Commentaire du poème de Louise Labé Ô beaux yeux bruns
Problématique : Comment la poétesse exprime-t-elle l'amour et le désespoir ?
I- L'expression de l'amour dans le sonnet
A- Le cadre énonciatif
La poétesse exprime l’amour et le désespoir avec un cadre énonciatif spécifique. Elle a fait un sonnet italien en décasyllabes. Louise Labé apostrophe l'homme aimé en utilisant une anaphore de “Ô” pour montrer son amour pour Olivier. L'homme aimé est d'abord désigné par métonymie : ("yeux bruns", "chauds soupirs"...) pour montrer ses qualités. Ensuite apparaît explicitement le pronom personnel "toi" (vers 12 et 14) pour montrer que le poème s’adresse exclusivement à Olivier. Le nom de l'homme n'est pas donné pour laisser le lecteur s'identifier à l'homme ; cela donne une valeur universelle du poème.
B- Le blason
Louise Labé parle des différentes parties du corps de l'être aimé : "beaux yeux bruns" vers 1, "front, cheveux bras mains et doigts" vers 9. Olivier est mis en valeur par des adjectifs mélioratifs comme par exemple : "beaux" vers 1, "chauds" vers 2...). Dans le vers 11 : "Tant de flambeaux" constitue le résumé des membres du corps qui était auparavant dissocié dans le poème mais ici sont rassemblés en un seul mot pour exprimer la beauté physique et le feu assimilé à l'amour. Tout le poème est donc un portrait élogieux de l'être aimé afin de le séduire.
C- La passion
L'amour n'est pas mentionné explicitement dans le poème mais transparaît dans le portrait élogieux avec tous les adjectifs mélioratifs que Louise Labé fait pour son homme. Le sonnet commence par l'évocation du regard (vers 1) avec le champ lexical de la vision : “yeux “ “regards”. De plus Louise Labé exprime "désirs obstinés" pour exprimer sa passion. Elle utilise le champ lexical du feu pour symboliser l'amour passionné ("flambeaux ", "ardre", "feu", "étincelle").
II- La plainte amoureuse
A- L'amour n'est pas réciproque
Cependant la poétesse utilise la Répétition de "vainement" vers 3 et 4 (mise en valeur par répétition à l'hémistiche) et "temps perdu" vers 6 pour montrer que l’amour n’est pas réciproque avec Olivier. Louise Labé fait une accélération de son poème en évoquant “Nuits et jours” (vers 3-4) pour montrer que l'attente est constante et dure depuis longtemps. De plus elle utilise la figure de style du Chiasme : "noires nuits" / "jours luisants" (inversion sujet / adjectif) pour mettre en valeur l'effort et l'attente. Ensuite elle utilise "quelque étincelle" vers 14 pour donner une idée de petitesse et de singulier afin de pour montrer l’idée que l'homme n'a aucun sentiment envers la narratrice.
B- L'expression d'un désespoir
La poétesse utilise l’anaphore du "Ô" lyrique 14 fois dans le sonnet pour exprimer le sentiment de désespoir et insister sur ce sentiment par la mise en valeur par une position en début de vers et à l'hémistiche. Le "Ô" lyrique devient plaintif à partir du vers 2 car elle utilise un vocabulaire péjoratif : "soupirs", "larmes"... Elle exprime sa plainte et son désespoir en utilisant “luth plaintif" (vers 10). Ensuite elle rend son vers musical vers 9-10 en se servant du parallélisme de construction pour donner de musicalité à son poème lyrique. L’utilisation de : "maux" au vers 8 exprime explicitement la souffrance de la poétesse. Celui-ci est mis en valeur car "maux" est placé au dernier vers du deuxième quatrain qui est aussi appelé volta sonnet qui signifie charnière. Louise Labé utilise majoritairement des phrases exclamatives pour exprimer ses sentiments qui fait donc ce poème un poème lyrique. La poétesse exprime son désespoir en utilisant "Tristes plaints" (vers 5). Ce sonnet est une élégie car c’est un poème lyrique qui exprime de la tristesse.
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Axel Hörhager (mercredi, 17 avril 2024 22:10)
Je viens de lire la traduction et les commentaires du fameux auteur allemand (autrichien) Karl Kraus sur ce poème. Il en propose la traduction comme ultime épreuve de langue allemande pour quiconque se vanterait de pouvoir en maîtrisier chaque nuance.
Un commentaire sur votre commentaire bien ficelé. Une partie délicate mais de mon point de vue essentielle concerne la phrase "pour ardre une femelle" - quelle merveilleuse manière d'englober tous les aspects de l'amour, y compris l'aspect physique. Et voila un vrai challenge de traduction pour ne pas sombrer dans une niaiserie évitant toute possibilité d'évoquer cette sexualité féminine qui me paraît essentielle au poème et son auteur.