Le Rouge et le noir de Stendhal, Le séminaire, chapitre 25

Le Rouge et le noir de Stendhal, Le séminaire, chapitre 25 De « Il vit de loin la croix de fer doré sur la porte» à « C'est la violente impression du laid sur une âme faite pour aimer ce qui est beau.»

I) Le portrait d’un démon

 

L’homme qui vient ouvrir la porte ressemble à un vampire: « un homme pâle, vêtu de noir ». Il fait peur à Julien : « Julien le regarda et aussitôt baissa les yeux. » Il ressemble à un démon, ce qui est renforcé par l’image du chat, animal associé aux sorcières, et à la couleur verte qui est la couleur du diable : « La pupille saillante et verte de ses yeux s'arrondissait comme celle d'un chat ». En effet, dans la littérature les monstres et les démons ont traditionnellement les yeux verts car Lucifer portait une émeraude au doigt lorsqu’il a été chassé du paradis et précipité dans les flammes de l’enfer. L’homme montre par son attitude et sa physionomie une absence totale de sentiments : « les contours immobiles de ses paupières annonçaient l'impossibilité de toute sympathie ; ses lèvres minces se développaient en demi-cercle sur des dents qui avançaient. » Julien est un jeune homme romantique et passionné, il est donc terrorisé à l’idée de devenir insensible comme lui s’il reste dans ce lieu maléfique : « Cependant cette physionomie ne montrait pas le crime, mais plutôt cette insensibilité parfaite qui inspire bien plus de terreur à la jeunesse. »

 

II) Un séjour en enfer

 

« Voilà donc cet enfer sur la terre, dont je ne pourrai sortir ! » : le séminaire est un lieu privé de vie, austère et froid (même la croix sur la porte est en fer et non pas en bois), « Un silence de mort régnait dans toute la maison. » C’est un lieu d’enfermement et donc de solitude : « Le bruit de la cloche retentit comme dans un lieu solitaire. » La description du séminaire est digne du romantisme noir (cf. Le château d’Otrante d’Horace Walpole) : « Ils montèrent deux étages par un large escalier à rampe de bois, dont les marches déjetées penchaient tout à fait du côté opposé au mur, et semblaient prêtes à tomber. » La pièce dans laquelle l’effrayant homme en noir conduit Julien ressemble en tout point à un caveau de cimetière : « Une petite porte, surmontée d'une grande croix de cimetière en bois blanc peint en noir, fut ouverte avec difficulté, et le portier le fit entrer dans une chambre sombre et basse, dont les murs blanchis à la chaux étaient garnis de deux grands tableaux noircis par le temps. » Même le fauteuil ressemble à un cercueil : « un petit fauteuil en planches de sapin sans coussin ». Julien se retrouve ainsi confronté à l’image de sa propre mort : « L'émotion et la terreur de Julien étaient telles, qu'il lui semblait être sur le point de tomber. » Le séminaire est donc présenté comme un lieu où aucune forme de vie n’est possible, car pour Stendhal l’homme est fait pour l’amour et l’art : « C'est la violente impression du laid sur une âme faite pour aimer ce qui est beau. »

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