Et si la vraie sagesse était d'assumer ses passions ?
Pour Rousseau les « vrais sages » sont ceux qui ont cultivé les passions, non ceux qui les fuient. Rousseau se différencie de la conception stoïcienne pour qui les passions sont une « maladie de l’âme ». Rousseau annonce le romantisme, à savoir qu’il n’oppose pas nécessairement les sentiments et la raison. Pour lui il y a une intelligence du cœur : « L’intuition est à l’âme ce que l’instinct est au corps ». Il ne dissocie pas la vie de la raison et la vie des sentiments. Il l’écrit dans La Nouvelle Héloïse : « Sentiment plus grand, idée plus vive ». Rousseau fait une opposition entre les « caractères froids et tranquilles » qui rejettent la passion et les sages qui la cultivent, ce qui les rend plus forts car volontaires et libres.
Les « caractères froids et tranquilles » sont ceux qui ont peur de leurs désirs et rejettent leurs passions. Ils n’ont jamais rien fait. Comme ils ne sont pas vaccinés contre la passion, ils sont encore plus déséquilibrés que les autres. Ils peuvent être les ascètes dont parle Nietzsche. Il faut les opposer aux « âmes de feu » qui ont accompli toutes les actions sublimes. Seule la passion peut s’opposer à la passion. Si nous entendons par vertu la capacité du sujet à se conduire selon des normes qu’il s’impose, des valeurs qu’il revendique, la vie amoureuse mais aussi l’amitié, et toutes les formes d’amour et de passion peuvent se consolider ; et les passions amoureuses décrites à travers la littérature échouent car elles ne débouchent pas sur un monde de valeurs communes, chacun est renvoyé à la solitude et à la mort. Dans Le Banquet, Diotime dit qu’aimer c’est regarder dans la même direction. Donc c’est bien la passion de la vertu qui équilibre toutes les autres.
Cependant, il y a des passions qui entraînent la folie, l’aliénation, l’auto-destruction. Il y a des êtres qui restent dans la solitude et dans l’appauvrissement de soi comme Harpagon dans L’Avare de Molière. Peut-être qu’il est difficile quelquefois d’échapper à certaines passions comme l’alcoolisme lorsqu’on a appris dans l’éducation à cultiver les passions.
Rousseau répond à cela en disant que « le vrai sage n’est pas plus qu’un autre à l’abri des passions », mais « les illusions perdues et les souffrances font partie de l’expérience et de l’expérience de la conscience ».
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