Une société sans religion est-elle souhaitable ?
La religion a une fonction sociale et pratique. Le culte religieux est déjà une amorce de la culture. Le but de la religion est de renforcer l’homme, de le discipliner. Les croyances religieuses servent de prétexte à des rites qui permettent à l’individu de se sentir appartenir à une communauté. La religion statique constitue une assurance contre la désorganisation sociale et contre la dépression morale devant la mort et l’imprévisibilité du monde. Kant analyse le fait religieux comme signe social. Toutes les sociétés ont une religion, elle apparaît comme l’expression d’un besoin naturel, une aspiration à l’absolu, un besoin de sens. La foi est engagement, oubli de soi et dépassement vers l’autre ; elle est l’occasion d’éprouver sa spiritualité. Au contraire, les pratiques superstitieuses tentent d’enchaîner Dieu par des rites et cela en fonction d’un intérêt pratique et égoïste. « La religion se borne à implorer la faveur des dieux sans jamais les contraindre » dit Bergson. Kant établit une différence entre la religion naturelle et les Eglises. « Qu’est-ce donc que la religion ? la religion est la loi présente en nous pour autant qu’elle reçoit son poids d’un législateur et juge au-dessus de nous ». Pour Kant, l’homme devient son propre législateur dans l’action morale. Celle-ci relève de la volonté déterminée par la raison et la liberté s’exerce à travers l’autonomie morale. L’existence de Dieu pour Kant n’est ni l’objet d’une démonstration théorique, ni la projection illusoire d’un désir. L’homme ressent le besoin d’une synthèse entre le désir et la raison. Seule cette unité peut produire du sens. Dieu est un postulat de la raison pratique. Ce n’est pas lui qui fonde la conscience morale, mais la réalisation de la conscience morale qui le présuppose. La religion relève d’un besoin métaphysique qui est commun à tous les hommes.
Pour Freud, Dieu est un père consolateur qui maintient l’homme dans l’infantilisme et l’empêche de devenir adulte. Dans la société, en tant qu’institution, l’Eglise est basée sur la répression des instincts. « La religion est la névrose obsessionnelle de l’humanité » dit Freud. Pour Marx, « La religion est le besoin d’un esprit dans un monde qui n’en n’a plus ». En donnant un sens à la souffrance, la religion maintient le peuple dans la résignation.
Le problème n’est pas de croire ou de ne pas croire, il est comment croire ? Kant dit que la foi doit s’exercer dans les limites de la raison. Le combat acharné contre la foi religieuse se fait au nom d’une autre foi aussi dogmatique. Il s’agit de respecter le domaine public et l’aspiration religieuse. Celle-ci ne s’exprime pas nécessairement à travers la foi en Dieu, elle se réalise à travers la création artistique.
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