Résumé du "Gorgias" de Platon
Introduction : Présentation de l'œuvre
"Gorgias" est un dialogue philosophique écrit par Platon, qui met en scène une discussion entre Socrate et plusieurs sophistes, dont Gorgias, Polos, et Calliclès. Le dialogue aborde des questions centrales de la philosophie morale et politique, telles que la nature de la rhétorique, la justice, la vertu, et le rôle du pouvoir dans la société. À travers ce texte, Platon critique la sophistique et explore les différences entre la philosophie et la rhétorique, tout en examinant ce qui constitue une vie bonne et juste.
Résumé détaillé
1. Introduction : La rencontre avec Gorgias
Le dialogue commence avec l'arrivée de Socrate et de son ami Chéréphon chez Calliclès, un aristocrate athénien. Ils y rencontrent Gorgias, un célèbre sophiste et maître de la rhétorique, qui vient de terminer une démonstration de ses talents. Chéréphon, intrigué, demande à Gorgias de définir son art. Gorgias se présente alors comme un maître de la rhétorique, une technique qui permet de persuader les autres dans toutes les situations.
Socrate, fidèle à sa méthode dialectique, commence à poser une série de questions pour clarifier ce qu'est réellement la rhétorique. Il cherche à déterminer si la rhétorique est une forme de savoir, une technique, ou autre chose. À travers ses questions, Socrate met en lumière que la rhétorique, telle que pratiquée par les sophistes, n'est pas une science rigoureuse mais plutôt une forme de flatterie qui vise à manipuler l'opinion publique sans véritable souci de la vérité.
2. La nature de la rhétorique : Dialogue avec Gorgias
Socrate poursuit son enquête en demandant à Gorgias si la rhétorique enseigne ce qui est juste ou si elle se contente simplement de persuader. Gorgias soutient que la rhétorique est capable d'enseigner ce qui est juste et injuste. Cependant, Socrate pousse Gorgias à admettre que la rhétorique, en tant qu'art de persuasion, n'est pas intrinsèquement liée à la vérité ou à la justice. Il argue que la rhétorique peut être utilisée pour des fins injustes aussi bien que pour des fins justes, et que les rhéteurs ne sont pas nécessairement vertueux ou savants en matière de justice.
Gorgias finit par concéder que la rhétorique n'est pas une science qui vise la vérité, mais plutôt une compétence qui peut être utilisée pour tromper ou manipuler les autres en fonction des objectifs du rhéteur. Cela amène Socrate à conclure que la rhétorique est une forme de flatterie qui s'apparente plus à la cuisine (qui cherche à plaire sans souci de la santé) qu'à la médecine (qui cherche le bien-être du corps).
3. L'intervention de Polos : La rhétorique et le pouvoir
À ce stade, Polos, un jeune disciple de Gorgias, intervient pour défendre son maître et la rhétorique. Il affirme que la rhétorique est un grand pouvoir, car elle permet de convaincre les masses et de contrôler les décisions politiques. Polos soutient que le pouvoir de persuader les autres est le bien le plus précieux, car il permet de faire ce que l'on veut.
Socrate remet en question cette vision en proposant une distinction fondamentale entre "faire ce que l'on veut" et "faire ce qui est bon". Pour Socrate, le pouvoir véritable ne réside pas simplement dans la capacité de réaliser ses désirs, mais dans la capacité de faire ce qui est juste et bon. Polos, cependant, défend l'idée que la rhétorique permet d'éviter les conséquences négatives des actions injustes, et donc qu'il est avantageux de savoir persuader pour échapper à la justice.
Socrate argumente que commettre une injustice est pire que de subir une injustice, car cela corrompt l'âme. Il soutient que ceux qui utilisent la rhétorique pour échapper à la justice nuisent à eux-mêmes plus qu'ils ne se protègent. En fin de compte, Socrate conclut que la justice et la vertu sont préférables à la rhétorique, car elles conduisent à la vraie liberté et au bonheur.
4. La confrontation avec Calliclès : La loi de la nature contre la loi de la cité
Calliclès, l'hôte de la discussion et un autre sophiste, prend la parole pour critiquer sévèrement Socrate et défendre une vision opposée. Calliclès méprise la morale conventionnelle et affirme que la justice, telle que définie par les lois de la cité, n'est qu'une convention inventée par les faibles pour protéger leurs intérêts contre les forts. Selon Calliclès, la loi naturelle veut que les forts dominent les faibles et que ceux qui ont le pouvoir de satisfaire leurs désirs le fassent sans restriction.
Calliclès propose donc une philosophie de l'amoralité basée sur la loi du plus fort et rejette la recherche philosophique de la vérité et de la justice comme étant des futilités réservées aux faibles et aux incapables. Il défend l'idée que le bonheur réside dans la satisfaction des désirs et la recherche du plaisir, et que la morale conventionnelle n'est qu'une entrave à cette recherche.
5. La réfutation de Socrate : La véritable nature du bonheur et de la justice
Socrate réfute les arguments de Calliclès en proposant une vision philosophique de la nature humaine et de la justice. Il commence par examiner la nature du désir et du plaisir, expliquant que la poursuite sans frein des désirs mène à une vie désordonnée et misérable. Socrate introduit la notion de tempérance (sophrosynè) comme vertu clé pour maîtriser les désirs et atteindre un équilibre dans l'âme.
Socrate utilise des analogies, comme celle du tonneau percé, pour démontrer que les désirs insatiables ne peuvent jamais être satisfaits, et que le véritable bonheur réside dans la maîtrise de soi et la modération. Il insiste sur l'idée que la vie vertueuse, en accord avec la justice et la vérité, est plus désirable qu'une vie de licence et de désordre.
En confrontant Calliclès, Socrate montre que le vrai pouvoir n'est pas la capacité de dominer les autres, mais la capacité de se gouverner soi-même en conformité avec la justice. Il conclut que la justice est essentielle pour une vie harmonieuse et épanouissante, et que l'injustice, même si elle peut apporter des gains matériels ou politiques à court terme, conduit à une dégradation morale et à un malheur à long terme.
6. Conclusion : Les dernières réflexions de Socrate sur la justice et la politique
À la fin du dialogue, Socrate continue de critiquer la rhétorique sophistique comme un art dangereux qui encourage l'injustice et la manipulation. Il maintient que la véritable fonction du discours est de rechercher et d'enseigner la vérité, non de flatter ou de manipuler l'opinion publique.
Socrate prophétise également que ceux qui poursuivent une vie injuste subiront finalement des conséquences néfastes, dans cette vie ou dans l'au-delà, suggérant une justice divine ultime qui punit les méchants et récompense les justes. Le dialogue se termine par une mise en garde contre les illusions du pouvoir et du succès mondains, et un appel à la vie vertueuse et à la recherche philosophique de la vérité.
Conclusion : Les thèmes de "Gorgias" et leur portée
"Gorgias" de Platon est une œuvre majeure qui traite des enjeux fondamentaux de la philosophie morale et politique. À travers les débats entre Socrate, Gorgias, Polos, et Calliclès, Platon explore des questions cruciales telles que la nature de la justice, la distinction entre le bien et le mal, et la place de la vérité dans la vie humaine.
Le dialogue met en lumière les dangers de la rhétorique manipulatrice et les pratiques sophistiques qui sacrifient la vérité pour le pouvoir et l'influence. Platon utilise Socrate pour défendre une conception de la vie fondée sur la recherche de la vérité, la justice, et la maîtrise de soi, rejetant l'idée que le bonheur réside dans la satisfaction des désirs égoïstes et la domination des autres.
En somme, "Gorgias" est une réflexion profonde sur les valeurs éthiques et politiques, la nature de l'âme humaine, et la quête de la vie bonne. Le texte reste une source d'inspiration et de réflexion sur la responsabilité morale et le rôle du discours dans la construction d'une société juste et éclairée.
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