Résumé de "Les Mouches", une pièce de Jean-Paul Sartre
Contexte de la pièce
"Les Mouches" de Jean-Paul Sartre se déroule dans l'ancienne ville grecque d'Argos, aux environs du XIIe siècle avant notre ère, soit quinze ans après le retour du roi Agamemnon de la guerre de Troie. À son retour, Agamemnon est tragiquement assassiné par sa femme, Clytemnestra, et son amant, Égisthe, qui gouvernent maintenant Argos. La fille d'Agamemnon, Électre, est retenue comme servante au palais, tandis que son fils, Oreste, est largement considéré comme ayant été assassiné avec son père.
Acte 1
Oreste et son tuteur arrivent à Argos, une ville en proie à une pénitence rituelle constante. Les habitants vivent dans un état de culpabilité et de repentir perpétuel pour les péchés passés, créant une atmosphère de misère et de désespoir. Oreste, ayant été élevé loin de cette superstition, observe la scène avec un mélange de curiosité et de perplexité.
Alors qu'ils explorent la ville, le dieu Zeus s'approche d'eux sous un faux nom. Il raconte à Oreste et à son tuteur l'histoire tragique qui a secoué Argos il y a quinze ans : le roi Agamemnon a été assassiné par sa femme Clytemnestra et son amant Égisthe. Zeus explique également que ce jour-là est un jour saint, où les morts sont libérés pour tourmenter les vivants en guise de punition divine. Complimentant la piété et le repentir des habitants d'Argos, Zeus tente de justifier cette souffrance incessante. Cependant, Oreste se demande comment les dieux peuvent approuver une telle misère abjecte. Son tuteur commente que l'éducation d'Oreste l'a libéré de telles superstitions, ce qui semble contrarier Zeus, qui les exhorte à quitter la ville.
Le tuteur part pour faire les préparatifs du départ, laissant Oreste seul. Pendant ce temps, Oreste rencontre sa sœur, Électre, qui vit désormais comme une humble servante au palais. Électre, rêveuse et pleine d'espoir, attend depuis longtemps le retour de son frère pour venger la mort de leur père. Oreste, sans révéler sa véritable identité, parle à Électre des beautés et des plaisirs des autres contrées, éveillant en elle un enthousiasme pour une vie différente de la misère d'Argos.
Clytemnestra entre alors et ordonne à Électre de se préparer pour le festival, un événement marquant le jour saint. La reine, rongée par la culpabilité de son acte hideux, parle de ses remords, mais Électre réagit avec dédain, incapable de pardonner ou de comprendre les justifications de sa mère. Oreste, cachant toujours sa véritable identité, écoute attentivement. Clytemnestra, ignorant qu'elle parle à son propre fils, lui dit de quitter Argos pour l'amour de sa propre mère, dans une tentative d'éloigner un étranger de la corruption et de la souffrance de la ville.
Lorsque Zeus revient, Oreste, malgré les avertissements divins, annonce sa décision de rester. Il est déterminé à affronter la réalité d'Argos et à prendre une décision sur son avenir et celui de sa famille. Cette décision marque un tournant crucial pour Oreste, qui commence à embrasser son destin et à se préparer pour la confrontation inévitable avec les meurtriers de son père.
Acte 2
L'acte 2 de "Les Mouches" s'ouvre avec les habitants d'Argos rassemblés devant un tunnel bloqué par un rocher géant. Ils attendent avec angoisse l'apparition des morts vengeurs lors de la cérémonie de la Journée des morts. Égisthe, l'amant de Clytemnestre et co-régent d'Argos, arrive en se plaignant de l'absence d'Électre. Malgré cette absence, il commence la cérémonie, implorant les morts de les punir pour leurs péchés.
Le grand prêtre chante et supplie les morts de venir punir les vivants. La foule, saisie de terreur, demande miséricorde et pardon. Égisthe, dans une vision effrayante, prétend voir Agamemnon parmi les morts, ce qui incite Oreste à presque attaquer le régent. Cependant, l'intervention d'Électre, qui entre joyeuse et vêtue de blanc, détourne l'attention. Elle danse avec défi et se moque de la peur des morts. Sa bravoure commence à ébranler la foi de la foule en Égisthe, les faisant douter de ses paroles.
Zeus, voyant le danger que représente l'influence d'Électre, fait tomber une pierre du temple pour rappeler aux habitants la puissance divine et les ramener à l'obéissance. La foule, encore une fois effrayée, se retourne contre Électre, et Égisthe en profite pour la bannir.
Oreste, se rendant chez Électre, tente de la convaincre de fuir avec lui pour éviter une fin tragique. Mais Électre, consumée par sa soif de vengeance, refuse de renoncer. Oreste révèle sa véritable identité, ce qui désespère Électre, croyant son frère trop doux pour commettre un meurtre. Désorienté et cherchant des réponses, Oreste implore les dieux de lui envoyer un signe. Zeus, dans une tentative de le détourner, envoie un signe incitant Oreste à partir. Au contraire, ce signe renforce la résolution d'Oreste à ne plus recevoir d'ordres, ni des dieux ni des hommes. Il décide alors fermement d'assassiner Égisthe et Clytemnestre.
Oreste et Électre se cachent dans la salle du trône pendant que deux gardes discutent de l'héritage d'Agamemnon. Égisthe et Clytemnestre, quant à eux, parlent du danger évité de justesse lorsque la foule a failli découvrir leurs mensonges. Égisthe, fatigué et déprimé, commence à croire à ses propres histoires sur les morts. Zeus apparaît et le met en garde contre Oreste, lui disant qu'Oreste doit être éliminé avant qu'il n'accomplisse sa vengeance. Zeus se plaint que "Oreste sait qu'il est libre," et cette connaissance menace le pouvoir des dieux et des rois. Comme le pouvoir de Zeus ne peut plus atteindre Oreste, il enjoint Égisthe de s'en occuper. Cependant, lorsque Oreste vient pour tuer Égisthe, ce dernier ne montre aucune résistance, acceptant passivement son destin.
Après le meurtre d'Égisthe, Électre commence à douter de leur cause, mais Oreste, maintenant résolu, se dirige vers les appartements de Clytemnestre pour accomplir la seconde partie de leur vengeance. Électre, restée seule avec le cadavre d'Égisthe, est prise de panique à l'idée des conséquences de leurs actes. Bien qu'elle proclame sa joie, sa perturbation est évidente.
Oreste revient, admettant avoir tué leur mère, Clytemnestre, qui est morte en les maudissant. Malgré cet acte matricide, Oreste ne ressent aucun remords. Tandis que la foule, alertée par les cris, s'approche pour les appréhender, Oreste et Électre s'enfuient vers le temple d'Apollon, cherchant refuge face à la colère imminente des citoyens d'Argos.
Acte 3
L'acte 3 de "Les Mouches" s'ouvre sur une scène de tension et de terreur. Oreste et Électre, épuisés et traqués, s'accrochent désespérément à la statue d'Apollon, cherchant un refuge sacré contre les Furies qui les poursuivent. Ils dorment debout, tentant de trouver un semblant de repos malgré la menace constante qui les entoure. Électre, terrifiée et désorientée, confie à son frère qu'elle se sent vieillir prématurément, marquée par une nuit de terreur et de culpabilité, tout comme leur mère avant elle.
Les Furies, figures vengeresses du remords et de la culpabilité, s'attaquent à Électre, lui rappelant le meurtre atroce de leur mère par Oreste. Électre, accablée par le poids de cette culpabilité, tente de retourner chez elle, de céder au désespoir et à l'auto-haine. Cependant, Oreste l'empêche de succomber, l'exhortant à ne pas se laisser engloutir par la culpabilité et à résister à la tentation de se haïr.
Zeus fait alors son entrée, proposant une offre à Électre : il promet de la protéger si elle accepte de se soumettre à la pénitence. Il tente de rationaliser les actions de ses parents, présentant leur crime comme le simple rêve d'un enfant solitaire et maltraité. Il propose de rendre à Oreste et Électre les places d'Égisthe et de Clytemnestre, mais cette offre est une tentative de manipulation visant à les ramener sous son contrôle.
Oreste, affirmant sa propre liberté et refusant de se soumettre, rejette l'offre de Zeus. Le dieu, furieux et déconcerté par cette rébellion, traite Oreste de lâche et convoque une vision céleste, rappelant qu'il a établi toutes les lois du monde. Il menace d'utiliser toute la force de la nature contre Oreste, mais lorsqu'Oreste le défie, Zeus recule, incapable de contester la liberté de l'homme.
Zeus reconnaît alors une vérité fondamentale : la liberté d'Oreste signifie son exil de la société, car cette liberté représente une menace pour l'ordre établi par les dieux. Il admet que la connaissance d'Oreste de sa propre liberté marque le début de la fin pour les dieux. Cependant, il souligne que son règne n'est pas encore terminé. Face à cette déclaration, Zeus se retire, et Électre, déchirée entre la loyauté envers son frère et la tentation de la soumission, suit Zeus, implorant sa miséricorde.
Oreste, désormais seul, demande à son tuteur d'ouvrir les portes du temple et s'adresse à la foule d'Argos. Dans un acte de défi et de rédemption, il déclare qu'il prendra sur lui toute la culpabilité de la ville, acceptant de devenir le bouc émissaire de leur misère collective. Il sort fièrement devant la foule, poursuivi par les Furies, incarnant la lutte ultime pour la liberté individuelle contre les forces oppressives de la culpabilité et de la tradition.
Ainsi, l'acte 3 conclut la pièce sur une note d'affirmation tragique de la liberté humaine, mettant en lumière le coût de cette liberté et la solitude qui l'accompagne. Oreste, par son refus de se soumettre aux dieux et à la culpabilité, devient un symbole de résistance et de courage face aux forces écrasantes du destin et de l'autorité divine.
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