Résumé de La Nausée de Jean-Paul Sartre
"La Nausée" de Jean-Paul Sartre se déroule en janvier et février 1932, dans la ville portuaire fictive de Bouville, en France. Bien que le roman se déroule en 1932, les jours de la semaine correspondent au calendrier de 1934. Antoine Roquentin, le protagoniste, est un homme de moyens indépendants qui, après des années de voyages à travers le monde, s'est installé à Bouville pour écrire un livre sur un aristocrate français du XVIIIe siècle, le marquis de Rollebon.
En janvier, Roquentin commence à vivre plusieurs expériences troublantes. Lorsqu'il ramasse une pierre, la sensation de sa surface humide lui donne un sentiment de "maladie douce". Une autre fois, il se penche pour ramasser un morceau de papier, mais se trouve incapable de le faire. Troublé par ces incidents, il décide de tenir un journal pour essayer de mieux comprendre ces expériences étranges.
Peu de temps après, en visitant un café, Roquentin est submergé par une sensation qu'il nomme "la Nausée". Il réalise que cette nausée n'est pas seulement en lui, mais qu'elle est présente dans le monde extérieur. Cette prise de conscience commence à éroder sa perception de la réalité et de sa propre existence.
Un jour, Roquentin reçoit une lettre d'une ancienne amante, Anny, qui lui demande de venir lui rendre visite à Paris. Bien qu'hésitant, Roquentin décide qu'il ira bientôt la voir. Pendant ce temps, il continue à passer ses journées à la bibliothèque, travaillant sur son livre sur Rollebon. Là, il engage la conversation avec un homme qu'il appelle l'Autodidacte, une connaissance qui se fraye un chemin à travers la bibliothèque en lisant chaque livre par ordre alphabétique.
Roquentin entretient également une liaison informelle avec Françoise, la directrice d'un café local à Bouville. Malgré cette relation, il se sent de plus en plus isolé et déconnecté du monde qui l'entoure.
Un jour, Roquentin se rend compte que son livre sur Rollebon est inutile. Il en vient à la conclusion que le passé est mort et que les choses n'ont pas de sens intrinsèque. Il se rend compte que son véritable objectif en écrivant ce livre était de s'isoler de l'existence, d'éviter de faire face à la réalité de sa solitude dans un monde dénué de sens. Maintenant que ce voile est tombé de ses yeux, le projet du livre n'a plus de but, et il décide donc de l'abandonner.
Cette réalisation marque un tournant dans la vie de Roquentin, alors qu'il commence à affronter la dure réalité de son existence et la nature absurde du monde qui l'entoure.
Pendant un déjeuner, l'Autodidacte engage une conversation passionnée avec Roquentin sur ses croyances en le socialisme et l'humanisme. Selon lui, l'humanisme est un système de pensée qui place les humains, leurs valeurs et leurs intérêts au centre de toute réflexion. Le socialisme, quant à lui, est une théorie économique prônant une structuration de la société où les biens matériels, les moyens de production et la richesse sont partagés et contrôlés par la communauté. L'Autodidacte essaie de persuader Roquentin que ces idées devraient également lui parler, mais Roquentin les rejette comme des abstractions vagues. Pour lui, ces concepts ne font que tromper l'Autodidacte en lui donnant l'illusion de comprendre et de maîtriser l'absurdité de l'existence.
L'Autodidacte mentionne également un livre intitulé "La Vie Vaut-elle la Peine d'Être Vécue ?". L'auteur de ce livre affirme que la vie n'a de sens que celui que nous choisissons de lui donner. L'Autodidacte pense que ces idées résonnent avec la philosophie de Roquentin, mais ce dernier estime que ces notions sont si éloignées de sa propre expérience qu'elles ne méritent même pas d'être discutées.
Après ce déjeuner, Roquentin prend un tramway et vit ce qui semble être une révélation profonde. Il prend conscience de manière aiguë de son existence. Cette réalisation, bien que déstabilisante, lui ouvre les yeux sur la nature brute et immédiate de la réalité. Plus tard, alors qu'il est assis sous un châtaignier, il a une vision encore plus intense de l'existence. Il se rend compte que les objets et les êtres n'ont pas de sens intrinsèque ; leur existence est purement contingente, et cette contingence lui provoque un sentiment profond de "Nausée".
Ce soir-là, accablé par cette nouvelle compréhension de la vie, Roquentin décide de changer de cap. Il envisage de déménager à Paris pour échapper à l'atmosphère étouffante de Bouville. Il planifie de rendre visite à Anny à Paris et de revenir à Bouville une dernière fois pour régler ses affaires avant de partir définitivement. Cette décision marque une nouvelle phase dans la quête de Roquentin pour trouver un sens à sa vie et échapper à la "Nausée" qui le hante. Sa détermination à quitter Bouville symbolise son désir de se libérer des illusions et de confronter la réalité de l'existence dans toute sa brutalité.
Quelques jours plus tard, Antoine Roquentin se rend à Paris pour rencontrer Anny, son ancienne amante, dans son hôtel. La rencontre est empreinte de nostalgie et de déception. Anny, autrefois belle et vibrante, apparaît maintenant vieille et corpulente aux yeux de Roquentin. Cette transformation physique reflète également un changement profond dans son état d'esprit et ses aspirations.
Anny avait autrefois pour ambition de créer et de vivre des "moments parfaits" à travers son métier d'actrice. Ces moments étaient pour elle des instants de pure harmonie et de réalisation esthétique, où la vie semblait s'élever au-dessus de la banalité. Cependant, elle a depuis renoncé à cette quête idéaliste. Elle confie à Roquentin qu'elle ne cherche plus ces moments parfaits. Sa vie actuelle est marquée par la résignation et le désenchantement.
Anny lui révèle qu'elle est désormais une femme "gardée", vivant sous la dépendance financière de son amant. Elle exprime son sentiment de déchéance avec une phrase poignante : "Je me survit." Cette confession met en lumière son sentiment d'être piégée dans une existence sans but ni passion, une simple survie sans véritable vie. La distance émotionnelle entre Roquentin et Anny est palpable, soulignant la fin de ce qu'ils avaient partagé.
Le lendemain, Anny part pour Londres avec son nouvel amant, laissant Roquentin seul avec ses pensées. Il retourne à Bouville, davantage désillusionné par la rencontre. La visite à Anny ne lui apporte aucun réconfort ni éclaircissement sur sa propre quête de sens. Au contraire, elle renforce son sentiment de solitude et d'absurdité.
Roquentin, confronté à l'échec de retrouver une connexion significative avec Anny, se retrouve à nouveau plongé dans la "Nausée". Ce retour à Bouville symbolise un retour à sa confrontation intérieure avec la contingence et le manque de sens de l'existence. Loin d'apporter une résolution, cette rencontre accentue son malaise existentiel et son sentiment de désorientation dans un monde où les "moments parfaits" ne semblent plus accessibles.
Pendant les derniers jours de Roquentin à Bouville, un événement marquant se produit. L'Autodidacte, avec qui Roquentin a eu des échanges réguliers à la bibliothèque, est impliqué dans un scandale. Un agent de sécurité surnommé le Corse aperçoit l'Autodidacte caressant la main d'un écolier de manière suggestive. Indigné par ce geste, le gardien réagit violemment, frappant l'Autodidacte et l'interdisant de la bibliothèque. Bien que Roquentin n'ait jamais particulièrement aimé l'Autodidacte, il se sent indigné par la brutalité de la réaction et l'injustice de la situation, percevant l'Autodidacte comme quelqu'un de fondamentalement inoffensif.
Plus tard dans la journée, Roquentin se rend au Railwaymen's Rendezvous, l'un de ses anciens repaires, pour dire au revoir à Françoise. Leur relation, toujours non exclusive, n'a jamais été marquée par une véritable profondeur émotionnelle, et leur adieu se déroule sans grand sentiment. Françoise accepte la fin de leur liaison avec indifférence, une séparation qui reflète la superficialité de leur connexion.
Au café, une serveuse propose de jouer la chanson préférée de Roquentin, une version ragtime de "Some of These Days". Alors qu'il écoute le disque, il remarque qu'il est rayé, perturbant ainsi l'écoute. Cette observation provoque en lui une réflexion profonde : il réalise que la chanson existe indépendamment de l'enregistrement matériel. Ce constat le mène à une révélation : la véritable essence de la chanson transcende le support physique, existant dans une forme pure et intemporelle.
Cette épiphanie pousse Roquentin à se demander s'il pourrait créer quelque chose de similaire à la chanson, mais dans un autre médium. Il décide alors d'abandonner ses recherches sur le marquis de Rollebon, un projet qui lui semble désormais futile et dénué de sens, et de se consacrer à l'écriture d'un roman. Il voit dans ce nouveau projet une chance de donner un sens à sa vie et d'explorer la condition humaine à travers la création artistique.
Roquentin quitte Bouville avec une nouvelle détermination. Plutôt que de se laisser submerger par la "Nausée" et le sentiment d'absurdité de l'existence, il choisit de se lancer dans une quête de sens par l'art. En quittant Bouville, il se tourne vers une nouvelle aventure, armé de la conviction que l'écriture peut lui permettre de transcender son malaise existentiel et de créer quelque chose de significatif et de durable, tout comme la chanson qui l'a inspiré.
Ainsi, "La Nausée" se termine sur une note d'espoir ambigu, où Roquentin, ayant confronté ses propres démons et les absurdités de la vie, décide d'accepter la responsabilité de sa liberté et de créer un sens à travers l'art, ouvrant la voie à une nouvelle phase de sa vie.
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