Analyse de « L’invitation au voyage » de Baudelaire dans Les Fleurs du mal

Analyse de « L’invitation au voyage » de Baudelaire dans Les Fleurs du mal

Comment à travers ce poème symboliste Baudelaire nous fait-il voyager à travers son art poétique ?

 

I) Un lieu symbolique

Il y a une correspondance entre la femme et le paysage : «ciel brouillé»,  feu et eau comme dans les yeux de Marie : éclats et larmes. La femme est unificatrice : le poète parle d’elle à la première et à la dernière strophe donc elle ouvre et clôt le poème.

Le lieu est décrit comme idéal car il est imaginaire, il n’existe que pour le poète avec le champ lexical du songe, les longues strophes et les vers impairs : il n’y a pas de véritables règles d’écriture.

Chaque strophe correspond à  un paysage différent sans transitions logiques tout comme dans un rêve. 

La ville paraît ancienne et riche : “polie par les ans”. Le lieu est parfait pour Baudelaire qui le décrit comme un paradis terrestre.

Ce lieu évoque le retour aux sources pour Baudelaire : l’exotisme est suggéré aux vers 20-23. Cela permet l’évasion du poète : “ailleurs” l3. Les richesses de toute la planète sont amenées ici pour assouvir ses désirs.

On note de nombreuses correspondances verticales avec les éléments qui s’élèvent vers le ciel : les mâts des bateaux, les arbres, les colonnes.

Les sensations sont riches. Synesthésie : “chaude lumière” : toucher / vue, “mêlant leurs odeurs” : l'odorat.  La lumière est chaude comparée à la froideur du Spleen. «Le monde s’endort / Dans une chaude lumière» : s’endort fait référence à  la mort tandis que la chaude lumière désigne plutôt le réconfort. 

L’eau et la lumière sont liées à travers le reflet : on voit la lumière et on sent l’eau grâce à la synesthésie. On trouve ici la dimension terrestre, le sens olfactif et visuel et enfin l’ambre qui peut être d’origine terrestre ou marine (l’ambre gris était très convoité à  l’époque). 

Les ciels sont brumeux sont mis en relation avec l’esprit embrumé de Baudelaire à cause du malheur de sa bien aimée. Ses yeux pleurent, il tombe amoureux en la regardant pleurer.

 

II) Un texte musical pour faire voyager le lecteur

L’univers de ce poème est harmonieux : il est composé de 3 strophes, symbole de totalité : construction en triptyque. Les strophes sont composées de 12 vers avec des rimes régulières.

Le rythme en trois temps est présent à  plusieurs endroits : c’est ici une référence à la valse, appréciée par Baudelaire.

Tout au long du poème les rimes sont féminines (avec un e muet) et encadrent des rimes masculines.

L’allitération en [s] : “Vois sur ces canaux” montre un léger souffle, et mime le vent dans les voiles. Cela renforce l’idée du voyage, comme si les bateaux avançaient.  Beauté de la terre, paradis terrestre.

Le refrain est très musical pour permettre au lecteur de se perdre dans le poème. Le refrain symbolise la ville, les sonorités sont douces, liquides : “Là, tout n'est qu'ordre et beauté, Luxe, calme et volupté.” Le calme triomphe dans cet univers harmonieux : la définition est synthétique. Le refrain indique ses désirs : la perfection, le luxe et la beauté de son art.

La dernière strophe traite du paysage et des bateaux : la musicalité est très aérienne, avec les allitérations en  [v] et en [s] comme si les bateaux volaient. Aspect doux et plaisant du voyage.

Il y a une allitération en [r] qui fait penser à une berceuse qui endort le lecteur.  Cela permet au lecteur de se laisser bercer par le poème.

Il utilise donc des allitérations de manière inhabituelles : elles ne sont pas synonymes de souffrance mais de bonheur.

 

Conclusion : Baudelaire réalise son rêve, il trouve une terre prête à l'accueillir, grâce à son imagination et à ses correspondances. Ce texte est donc une longue synesthésie qui permet au lecteur de voyager.

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