Analyse de « Les effarés » dans Les Cahiers de Douai de Rimbaud

Analyse de « Les effarés » dans Les Cahiers de Douai de Rimbaud

I) La dénonciation de la misère 

Tout d’abord, on relève le champ lexical du froid : “dans la neige”, “Ils sont blottis”,“Et que leur chemise tremblote”, couplé au champ lexical de la misère : “misère !”, “Sous leurs haillons” afin de susciter la compassion du lecteur. De plus, les allitérations en [r] évoquent la douleur des enfants qui regardent le pain inaccessible : “Noirs dans la neige et dans la brume, Au grand soupirail qui s'allume, Leurs culs en rond”, “Ils voient le fort bras blanc qui tourne La pâte grise et qui l'enfourne Dans un trou clair.”

Cette séparation entre les enfants bloqués dans le froid et le pain qui représente la vie, est soulignée par les jeux d’oppositions entre l’ombre et la lumière : “Dans un trou clair”, “Noirs dans la neige et dans la brume”, “Façonné comme une brioche On sort le pain,” “Que ce trou chaud souffle la vie”. Les enfants sont tenus à l’écart par une grille comme des animaux : “Collant leurs petits museaux roses Au treillage”. De plus, les mots  “tout bêtes” révèlent leur aspect de bêtes stupéfaites devant la scène : “Tout bêtes, faisant leurs prières Et repliés vers ces lumières”. Au final la chute est cruelle puisqu’ils restent dehors sans avoir pu avoir de pain : “Si fort qu'ils crèvent leur culotte Et que leur chemise tremblote Au vent d'hiver.”.

II) La rébellion contre Dieu

Le poète reproche à Dieu de permettre la misère de ces enfants qui n’auront finalement pas accès au pain. En effet, la symbolique du pain est très importante dans ce poème car le pain fait référence à l’eucharistie qui semble refusée aux enfants comme une condamnation à mort spirituelle autant que physique : “Que ce trou chaud souffle la vie” et “Ils se ressentent si bien vivre”. De plus, les allitérations en [s] renforcent cette symbolique mystique, car elles représentent le souffle divin : “Ils ont leur âme si ravie Sous leurs haillons, Ils se ressentent si bien vivre”.

Cette symbolique n’est plus voilée lorsqu’à la fin du poème les enfants en appellent à Dieu qui ne leur répond pas : “Tout bêtes, faisant leurs prières Et repliés vers ces lumières Du ciel rouvert, Si fort qu'ils crèvent leur culotte Et que leur chemise tremblote Au vent d'hiver.” Ces enfants apparaissent donc comme des sacrifiés, à l’image de Jésus : “Les pauvres Jésus pleins de givre”. Sacrifice bien inutile qui n’éradique pas le fléau de la misère.

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