Analyse de Emile Zola, La Bête Humaine, chapitre II : le meurtre de Grandmorin
1. Comment Zola décrit-il l’arrivée du train ? Quels effets cette description produit-elle sur le lecteur ?
Zola décrit l’arrivée du train comme une apparition soudaine et violente. Il utilise des
images de lumière et de feu : « la gueule noire du tunnel s’éclairer, ainsi que la bouche d’un four, où des
fagots s’embrasent », puis « l’éblouissement de son gros œil rond ». Cette description crée un effet
de puissance et de danger, renforcé par le rythme rapide des phrases et le champ lexical du fracas et de la vitesse : « une apparition en coup de foudre », « un tel vertige de vitesse ». Cela plonge le lecteur dans une scène fulgurante et presque irréelle.
2. Quelle est l’importance de la lumière et du contraste entre le clair et l’obscur dans ce passage ?
La lumière joue un rôle essentiel pour rendre la scène plus dramatique. L’opposition entre l’éclat du train et l’obscurité environnante accentue le côté brutal et éphémère de la vision de
Jacques. La lanterne du train « troua la campagne, allumant au loin les rails d’une double ligne de flamme
», mais après son passage, il ne reste que « les trois feux de l’arrière, le triangle rouge ».
Cette alternance de clair et d’obscur symbolise l’incertitude et le doute du personnage face à ce qu’il a vu.
3. Comment le point de vue de Jacques influence-t-il la perception du meurtre ? Pourquoi hésite-t-il sur ce qu’il a vu ?
Le lecteur découvre la scène du meurtre uniquement à travers le regard de Jacques, qui perçoit l’événement en un instant. Il aperçoit « un homme qui en tenait un autre renversé sur la banquette et qui lui plantait un couteau dans la gorge », mais
tout va si vite qu’il doute immédiatement : « Avait-il bien vu ? et il hésitait maintenant, il n’osait plus
affirmer la réalité de cette vision ». Son incertitude est renforcée par la vitesse du train et l’éclairage changeant, ce qui ajoute une dimension onirique et presque irréelle à la scène.
4. En quoi ce passage illustre-t-il les principes du naturalisme, notamment dans la description des sensations et dans le rôle du destin
?
Zola applique ici les principes du naturalisme en insistant sur la perception sensorielle du personnage et en suggérant une forme de fatalité. Jacques est submergé par ses sensations
: « un tel vertige de vitesse, que l’œil doutait ensuite des images entrevues ». Son incapacité à être
sûr de ce qu’il a vu montre comment l’homme est soumis à des forces qui le dépassent. De plus, la scène semble dictée par un enchaînement inexorable : le train passe au moment précis du crime,
renforçant l’idée de destin, un élément central du naturalisme.
5. Quels procédés stylistiques Zola utilise-t-il pour créer une impression de vitesse et de confusion ?
Zola utilise des phrases longues et des accumulations pour traduire la rapidité du train : « tout de suite
les wagons se succédèrent, les petites vitres carrées des portières, violemment éclairées, firent défiler les compartiments pleins de voyageurs ». L’emploi de termes liés au mouvement
(« défiler », « vertige », « fuyait ») accentue cette impression. L’alternance entre des phrases descriptives et des interrogations (« Avait-il bien vu ? ») renforce la confusion du personnage et du lecteur.
6. Pourquoi peut-on dire que Jacques est un témoin passif ? Comment cette scène annonce-t-elle la suite du roman ?
Jacques assiste au crime mais ne peut ni intervenir ni même être certain de ce qu’il a vu. Il est « cloué sur
place », incapable d’agir, ce qui montre son impuissance. Cette scène annonce la suite du roman car elle marque un basculement dans la vie de Jacques : son rôle de témoin le lie au meurtre
et à la fatalité qui pèse sur lui. L’incertitude qui entoure cette vision préfigure aussi la complexité psychologique du personnage et les tensions du récit.
7. Comment la description du meurtre et de l’incertitude de Jacques contribuent-elles à l’ambiance tragique et fatale du roman ?
L’évocation du meurtre est rapide et marquée par le doute : « Pourtant, il avait cru d’abord distinguer, sous
un déroulement d’épais cheveux, un fin profil pâle. Mais tout se confondait, s’évaporait, comme en un rêve ». Cette hésitation crée une atmosphère tragique où la frontière entre réalité et
illusion est floue. L’idée de fatalité est renforcée par la vitesse du train, qui symbolise une force inéluctable : le destin est en marche, et Jacques ne pourra pas y échapper.
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